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Conflit coutumier en Irumu: entre résistance des vieux sages et des familles régnantes, l’administration militaire s’impose

Par Sarah Abibo

Le territoire d’Irumu en province de l’Ituri dans la partie nord-est de la République Démocratique du Congo est de plus en plus le socle des conflits coutumiers. Il devient difficile, si pas dire impossible, qu’il y ait intronisation d’un chef coutumier sans se confronter à une résistance soit des vieux sages soit des membres de la famille régnante ou encore d’un groupe d’individus.

Des résistances sanguinaires.

Il est quasi impossible, en Ituri de voir un conflit aboutir à une résolution sans qu’un goûte de sang ne soit versé. Le conflit coutumier non plus n’en est pas épargné. Si pour certaines chefferies, secteurs ou groupements l’on a pas répertorié le cas de morts lié à ce conflit, mais dans d’autres on en a assisté. C’est le cas du groupement Kabarole dans la chefferie des Bahema d’Irumu où on a assisté à l’incursion d’hommes armés inconnus en 2020, causant la mort de plus d’une personne et l’incendie de plusieurs maisons d’habitations. Selon plusieurs sources, cette attaque était dûe à un conflit coutumier qui opposait le chef Ndolelire Mbafumoya David à certains membres de la famille régnante qui s’opposaient à son règne à la tête de ce groupement. Lequel conflit qui a perduré jusqu’à l’arrivée de l’état de siège et qui a été récemment résolu pour maintenir ce dernier à son titre. 

Des conflits pour des intérêts égoïstes 

Irumu est parmi les territoires de l’Ituri qui regorge à la fois des terres arables et des minerais. Normalement, il serait l’un des territoires le plus développé si et seulement si ce phénomène de conflit coutumier n’avait pas pris le dessus. Selon nos sources, la plupart de ces conflits sont dûs aux intérêts égoïstes. Certains vieux sages ou membres de la famille régnante s’opposent à l’installation d’un tel individu car ils se voient ne pas trouver une part significative qui pourrait leur revenir. Par ailleurs, d’autres sources renseignent que certaines autorités installent un tel individu parce qu’ils considèrent de faible esprit qu’ils peuvent facilement manipuler pour leurs intérêts personnels ou pour remplir leurs poches; et ceci sans respecter l’arbre généalogique du pouvoir coutumier.

Des démarches pour la solution 

L’administration militaire dans sa phase de l’approche civile n’a pas mis de côté cette question de conflit coutumier. Depuis son arrivée en Ituri il ne cesse d’organiser, par l’entremise de l’administrateur de ce territoire, des séances de sensibilisation pour amener les parties en conflit à un accord ou à une acceptation pour éviter le pire. Une commission consultative de règlement des conflits coutumiers de la province est même mise en place pour, à chaque fois, résoudre ce problème. Récemment au mois de Juillet 2024, l’administrateur de ce territoire a même participé à une rencontre d’une délégation de cette commission qui s’était rendue en chefferie de Walendu-Bindi afin de trouver pacifiquement une solution au conflit de pouvoir coutumier qui oppose jusqu’à présent le chef Olivier Peke, déchu depuis plusieurs années maintenant, et l’actuel chef Fidèle Mongaliema.

L’administration militaire s’impose

Malgré les efforts fournis par les autorités pour résoudre ce problème, il continue de persister. Alors l’administration militaire semble ne plus céder à certains caprices. C’est le cas du groupement Tondabo de la chefferie de Babelebe toujours dans ce même territoire où malgré le refus d’installation du nouveau chef, Israël Herabo par les vieux sages et les membres de la famille régnante ainsi que l’opposition de son frère César Dalina, l’administrateur militaire du territoire d’Irumu a quand-même procédé à cette installation. D’après les vieux sages, cette décision a violé l’arbre généalogique du pouvoir coutumier de ce groupement. La même situation a été également observée dans d’autres groupements où malgré l’opposition, l’administrateur du territoire s’est imposé à installer des chefs coutumiers.

Pouvoir coutumier violé ?

Comme dit la loi congolaise, le pouvoir coutumier ne peut être violé. Car celui-ci a sa place, d’autant plus qu’on ne peut pas enterrer la coutume. Installer quelqu’un sans respecter l’arbre généalogique reviendrait à violer le pouvoir coutumier, cependant, installer quelqu’un qui n’est pas loyal envers la société est un risque d’autant plus que la situation sécuritaire de la province reste fragile.

Que faut-il faire ?

Puisqu’on ne peut ni violer le pouvoir coutumier moins encore exposer les entités à la megestion ou à l’insécurité, le mieux à faire est de prendre un temps pour consultation de toutes les parties impliquées dans le conflit avant l’installation d’un chef coutumier. Écouter les raisons, ça et là pour éviter un probable refus de tel suite à l’installation de tel autre. Que chaque partie prenne conscience de l’importance d’avoir une personne qu’il faut à la place qu’il faut pour le développement de ce territoire. Que l’intérêt particulier ne prime pas sur le choix d’un chef coutumier mais plutôt privilégier l’intérêt général du territoire voire de la province.

Sarah Abibo

Sarah Abibo

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